La Loi des Robots

Ce texte paru sur le blog YURTAO, la voie de la yourte en novembre 2009, est d’autant plus percutant, aujourd’hui en 2011, alors qu’a été adoptée l’infâme LOPPSI 2, qui transforme en hors-la-loi tous ceux qui vivent dans des habitats dits « légers » (Caravanes, yourtes, camions, …) …
La Loi des Robots
Vous n’avez pas le droit de désirer vivre simplement.Vous devez consommer plus, pour alimenter les actionnaires du système.
Vous n’avez pas le droit de vivre sous une yourte, avec un lavabo dehors, des toilettes séches, un panneau solaire, avec juste un poele pour l’hiver et un drap mouillé pour toute clim devant votre porte- fenétre. Vous n’en avez pas le droit parce qu’alors vous n’êtes pas solidaire. Pas solidaire avec le système qui a besoin de votre argent, de vos bras, de vos désirs, de vos forces de travail, de votre temps, de votre pensée, et même de vos rêves.
Vous n’avez pas le droit d’être pauvre, vous devez être ou nanti ou misérable, qu’on sache au moins ou sont les frontières pour empêcher la contamination.
Vous n’avez pas le droit de vous éclairer modestement, juste à l’endroit nécessaire, vous devez spoter et sonoriser tous azimuts votre maison pour soutenir le programme nucléaire du pays.
Vous n’avez pas le droit de coudre vos vêtements ou de rafistoler la fripe que vous avez récupéré, ni de superposer les couleurs et les coupes, vous êtes vieux jeu, passéiste, excentrique, dégoutante, et c’est pas carnaval tous les jours.. Ni de trotter dans des mocassins de votre cru, alors que, dans votre ville préfecture, pas moins de quarante boutiques de chaussures vous attendent, au milieu d’une bonne centaine de magasins de vétements. Pas le droit d’y aller avec vos vêtements usés, fripes la bas, on défile en portemanteaux sur tous les trottoirs, faut que ça brille le neuf!
Vous n’avez pas le droit de vous doucher une fois par semaine, c’est sale, il faut se doucher tous les jours, c’est la norme dans les pays ou l’eau abonde.
Vous n’avez pas le droit de cueillir la saponaire pour vous récurer, et encore moins d’utiliser les cendres de votre feu pour faire tremper votre culotte. Vous devez ronger votre peau avec des détergents cancérigènes que des savants obligeants ont concoctés pour vous. Pas le droit d’emaner vos propres odeurs, ça pue. Et si vous avez un cancer, vous n’avez pas le droit de râler, votre pays est celui ou sévissent le plus de spécialistes, vous avez de la chance d’être née dans un endroit doté d’une industrie médicale performante.
Vous n’avez pas le droit de jeuner, la mode est aux obèses.
Vous n’avez pas le droit d’avoir faim, c’est de la résistance malsaine contre le gavage généralisé. Pas le droit de vous soigner avec les remèdes de grand-mères, et encore moins avec les plantes sacrées des peuples premiers, car ils appartiennent désormais à ces petits futés qui leur ont rajouté suffisamment de colorants et d’emballages pour y aposer leur marque, et faire fleurir ainsi l’industrie pharmaceutique.
Vous n’avez pas le droit de vieillir, ca fait tache, pas le droit d’être jeune, c’est dangereux.
Vous n’avez pas le droit d’aller cueillir des orties dans le champ d’à coté, encore moins de faire de la pub à vos copains sur les qualités extraordinaires de cette plante, car c’est du vol. L’ortie a été privatisée pour vous être revendue à son juste prix. L’autre jour, mon voisin m’a passé un sac de salade sauvage à travers sa clôture, et bien que ça soit de l’escroquerie organisée, une trahison qui fait éclater le trou de la sécu, je me suis franchement régalée. Bien que, quand même, cette salade, elle avait un parfum de Titanic. Pas le droit de ressemer les graines que vous avez gardé de l’année dernière, semences car vous volez les grosses firmes de semenciers qui, sans vous, ne peuvent plus gouverner et enrégimenter le monde.
Vous n’avez pas le droit de passer vos soirées seule, c’est indécent, vous devez être solidaire avec les millions de célibataires du pays qui cherchent à vous contacter pour une partie de jambes en l’air. Vous n’avez surtout pas le droit de préferer pour tout compagnon un feu qui crépite tranquillement dans le poêle, car bouder la télé, c’est être désinformé, comment donc pourrez vous voter correctement?.
Vous n’avez pas le droit de prendre des risques inconsidérés, en ne fermant pas votre porte à triple tour, candenas triple pennes, triples cadenas, et en ne truffant pas vos remparts de signaux d’alarme débloquant tous les gorilles du quartier prêts à vous faire justice. Vous devez vous assurer auprès de compagnies qui s’occupent de tout, et surtout de vous dépouiller de votre peur.
La peur. Finalement, tout tourne autour votre peur de mourir.
Dans ma petite yourte, je ne prends pas beaucoup de place et je n’abime pas beaucoup la planète, alors j’ai appris à domestiquer ma peur.
Dans ce monde matérialiste, préparer sa mort semble une insulte à la course au développement.
Or, se dépouiller, se simplifier, c’est une façon de reconnaître qu’aucune accumulation ne vaincra la peur de la mort.
C’est faire de la place à ses enfants.
Aux enfants de la terre de demain.
Mais il est interdit de le souhaiter, interdit de l’espérer: désormais les parents qui osent vouloir partager un vrai avenir avec l’étrangeté du monde sont menacés de prison.
Ici ou là-bas !
> Source : YURTAO, la voie de la yourte
A Propos de Yurtao, la Voie de la Yourte
Fabriquer et habiter sa yourte, s’engager et inventer un nouvel art de vivre. Blog politique et spirituel en lutte pour le droit à l’auto-détermination de l’habitat social -écolo, pour la reconnaissance des Etablissements Humains Modestes et Légers.
Waow …. je n’aurais pas dû car c’est sans commentaire.
Texte toujours d’actualité, mais par contre, l’article 32 ter A de la loi Loppsi 2 proposé par le gouvernement, qui menaçait d’éradiquer violemment nos campements de yourtes, n’est pas passé!
Le Conseil Constitutionnel l’a réfuté!
Fraternellement, Sylvie.